verbatim

from journal l'Equipe du 29 avril 2005.

Parce que c'est toujours passionnant d'écouter (ou de lire en l'occurrence) ce que dit André Agassi...

Citation :

VERBATIM
« Je me souviens de Jimmy Connors au même âge, d’autant que je l’ai affronté plusieurs fois. J’étais très admiratif. Comme personne d’autre ne jouait aussi bien à un âge aussi avancé, je me disais que cela devait être un sacré exploit. Mais mon souci principal était de savoir comment faire pour pouvoir le battre. (…)

Je comprends pourquoi la plupart des joueurs ont déjà raccroché leur raquette à trente-cinq ans. Ce n’est pas facile de continuer… Quand je vois les plus jeunes, je me dis : ‘les gars, vous avez de la route à faire, et je n’aimerais pas me retrouver des années en arrière’. (…)

Pour durer, il faut écouter son corps, de sorte que lorsque vous lui demandez un effort, il vous entende. C’est incroyable tout ce qu’il peut vous dire. Un corps en bon état vous prédispose à être plus fort mentalement. Tous les signes me prouvent que je n’ai jamais été mieux préparé que maintenant. La suite, essentielle, c’est de savoir à quelle vitesse tout va se mettre en place une fois sur le court : contre des types comme Coria, Federer ou Roddick, il n’y a pas de temps à perdre. Il faut que ça vienne vite. Pour être honnête, aujourd’hui, je n’ai pas d’autre choix que l’engagement dans l’excellence physique. (…)

Je m’entraîne plus dur, et plus intelligemment qu’avant. Je dois savoir quand je dois me faire violence et quand je dois lâcher prise. Sur le court, je ne veux pas sentir le poids des ans. Je ne l’ai pas senti durant la majeure partie de ces dernières années. (…) En vieillissant, on devient plus efficace dans la manière de gérer son temps. On va directement à l’essentiel. En contrepartie, il faut sans cesse opérer un ajustement à chaque changement dans sa vie. Il faut être toujours être attentif et évaluer objectivement les évènements dans la perspective d’une carrière entière. Il faut savoir à quel moment dire : ‘ce n’est plus moi.’ (…)

Savoir couper est un énorme atout à mesure qu’on vieillit, mais la pire des choses serait de ne rien faire et de s’asseoir sur son canapé. Même si je ne joue pas en compétition, je m’entraîne bien, à la fois quantitativement et qualitativement. Le côté positif, C’est que je me sens de nouveau bien dans mon corps et frais mentalement quand je reviens. Pendant un break, il faut rester connecté avec le jeu. Penser sans cesse à ce qu’on ressent en entrant sur un court, aux obstacles qui se dressent devant soi. Se souvenir combien il est difficile de faire paraître tout ça facile. Alors, quand je ne suis pas en tournois, j’ai toujours bien en tête que la reprise va être terrible, que ça va faire mal, que les poumons et les jambes vont brûler, que les articulations vont souffrir. C’est ça avoir l’envie. (…)

Le tennis m’occupe encore beaucoup l’esprit. C’est une bonne chose. En tout cas, mon mode de vie actuel est tout sauf ennuyeux. J’ai deux enfants et je parcours le monde pour affronter les meilleurs. Si ça c’est ennuyeux…

Le tennis m’a procuré une vie incroyable. Il m’a donné l’occasion de passer le reste de ma vie avec mes enfants si je le souhaite. Alors arrêter ne dépend pas de ce que je veux faire, mais de la qualité de mon investissement. Or, je veux essayer de continuer le plus longtemps et le plus durement possible jusqu’à ce que je ne puisse plus. Le jour où je sentirai que je joue mon meilleur tennis mais que je ne gagne plus, je dirai stop. Cela ne m’est encore jamais arrivé. Certains disent peut-être : ‘pourquoi ne raccroche-t-il pas ?’ mais je continue à bosser pour me donner le maximum de chances. Si je peux encore le faire, je sens une responsabilité et une obligation de continuer. (…)

Que vais-je faire le jour de mon anniversaire ? Oh, je n’en sais rien (rire). Je n’ai jamais accordé beaucoup d’importance aux anniversaires. Mais aujourd’hui je suis amené à le faire davantage pour faire plaisir à mes enfants. Dans cette perspective, je ne prévois rien. Je considère que ce serait déjà beaucoup si je décidais de brancher mon téléphone portable… »

- Ces propos ont été compilés à l’occasion de conférences de presse données par Agassi au cours des derniers mois